jeudi 15 août 2013

Dragon Magazine, Juin 1978, Vol. 3 no 1, #15

D&D = Distances Débiles ?

Ou comment Albert Camus et Gary G. se croisent à leur insu

Au détour du feuilletage, que ne voilà pas des tables pour des trous errants… euh, je veux dire, aléatoires. Des trous pour combler des vides, il fallait y penser : un trou peut donc être vide (60% des cas), occupé (35%), ou bien téléporteur ou sans fond. Six tables permettent ainsi de déterminer la nature de l'occupant : des habituels pieux à des tas d'insectes, voire un malheureux tombé dedans avant vous, dont on déterminera la nature (monstre ou humain).

À côté de cette demi-page de tables, voici une contribution australienne de N.  Robin Crossby (paix à son âme) : une table pour meubler le temps qui passe (Random events table for settlements or settled areas).

Je croise aussi la seconde partie d'un article dont je n'ai pas parlé : James M. Ward, son pote Monty et d'autres jouent depuis quelques numéros de la revue avec leurs centaines de figurines (G.I. Joe (TM), dinosaures en plastique, tanks et bombardiers, chevaliers, orcs, etc.) à une sorte de "wargame freestyle". Je n'ai que survolé le texte, qui s'étend sur les heures passées à piloner au mortier un château médiéval, à repousser des orcs soutenus par des tanks à coups de fireball sur les plages de Normandie, etc. J'imagine que, quand on est à court d'articles et de pages de publicité, il faut bien trouver quelque chose à mettre dans son magazine… En ce qui me concerne, je m'engage à ne pas parler ici des histoires de poney de ma fille, ni d'une quelconque adaptation à GURPS de ses aventures.

Plus loin, certaines pages nous rappelle qu'à la fin des années 70, la maquette d'un magazine se faisait encore à coups de ciseaux et de colle (quand le maquettiste n'avait pas tout reniflé). On trouve ainsi sur une même page trois rectangles de texte improbablement superposés : la suite de la page précédente, la suite de la page 2 et la suite de la page 4.

Le PHB est annoncé pour la GENCON XI (août 1978).

La perle de ce numéro est, une fois encore, un article de Gary G., à qui il faut un peu plus d'une page pour traiter de la question suivante :
The differences between the indoor ground scale, 1” = 10 feet, and the outdoor measure of distance, 1” = 10 yards causes considerable confusion and misunderstanding amongst DMs and players alike.
Effectivement, ce détail des règles de D&D/AD&D, à défaut de nous avoir causé une « considérable confusion », nous faisait beaucoup rire (incapables de nous faire aux « hiardz » et aux « fitz », nous disions « bip » pour « 1' » et « bip-bip » pour « 1” », le bip valant donc un dixième de bip-bip). La prochaine fois que je retrouverai mes vieux amis de lycée, je pourrais donc leur expliquer le pourquoi de cette incongruïté qui, nul ne prétenda le contraire, fut source de milliers d'heures d'insomnies de part le monde.

Bon, en fait, je ne pourrais pas vraiment. Une fois de plus, le style de Gary, entre dans des explications d'espace-temps (les différences d'échelle entre CHAINMAIL et D&D, la portée des armes, la durée d'un round, la surface occupée par le socle d'une figurine, la vitesse de mouvement et le fait qu'il faut que les figurines puissent rester sur la table en un tour, etc.) et ses anecdotes d'untel à telle convention, m'a complètement fait perdre le fil. En conclusion, retenons simplement que
the blame for the possible ignorance of player and Dungeon Master alike rests squarely on my shoulders. It would have been a small matter to explain to everyone that the outdoor scale must be used for range only, never for area of effect.
Ah bon ? ç'aurait été bien plus simple ? En ce qui me concerne, la confusion, je la vois plutôt dans la tête de M. Gygax. Une règle pareille, ça ne s'invente pas (elle se retrouvera verbatim page 39 du PHB). Alors que T.S.R. est en pleine rédaction d'AD&D, plutôt que de revoir les portées (armes de jet, mouvements, sorts), le grand architecte de l'univers rôliste conserve un système de mesure ubuesque, pour des raisons qui m'échappent encore malgré une longue (tentative d') explication.

« Le suicide résout l'absurde », disait Camus.  Merci, donc, The Dragon, de me rappeler les fous rires de mon adolescence et d'avoir su conserver mon goût de l'absurde, me sauvant ainsi du suicide.

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